Etude d'une population d'oiseaux par le baguage
près d'Orléans (France)
Ringing birds on the edge of the river Loire (France)
Lionel FREDERIC
Quatre espèces étudiées sont soumises aux aléas climatologiques du Sahel durant les mois d'hivernage et de migration :
Fauvette grisette (savanes herbacées)
Fauvette des jardins (savanes arborées)
Hypolaïs polyglotte (savanes arborées)
Rossignol philomèle (savanes arborées)
Actualités sahéliennes
Trois mois de pluies intenses chaque année...
Fin juin, de l'air marin humide pénètre dans les terres africaines, "aspiré" par les basses pressions du sud saharien. Cet air humide libère d'énormes quantités de pluies : en 3 mois, il tombe 600 mm d'eau sur Niamey, soit autant qu'à Paris en un an, et avec une évaporation supérieure !
Le phénomène s'interrompt en septembre.
Le graphique des anomalies de précipitations présenté ci-dessus illustre les grandes variations de quantité de pluie que peut connaitre le Sahel d'une mousson à l'autre (source : JISAO).
La grande sécheresse des années 1970 et 80, qui s'est terminée avec la mousson 1994, apparaît clairement sur ce graphique.
Depuis la fin des années 1990, la région connait une succession de moussons "excédentaires" et de moussons "déficitaires".
La mousson 2012 a marqué le début d'une période de précipitations conformes à la moyenne, voire excédentaires, comme en 2015 et 2016.
Si cette amélioration peut bénéficier à la flore et à la faune, la situation des populations humaines locales reste toutefois précaire, très dépendante de la quantité de fourrage disponible pour le bétail durant l'été.
Les moussons 2018, 2019 et 2020
La période juin-août 2018 a vu des quantités de précipitations légèrement supérieures à la normale dans toute la zone sahélienne (+ 50 à + 150 mm de précipitations pour ces 3 mois).
Ensuite, les précipitations ont été abondantes dans la partie centrale (Mali, Niger) et plus rares à l'ouest (Sénégal) et à l'est, signant un bilan "positif", bienvenu après une saison sèche (novembre 2017 à mai 2018) restée dans la norme.
En 2019, les précipitations de juin à août ont été sensiblement excédentaires dans la partie centrale du Sahel (centre du Mali, Niger, Tchad, sud-ouest du Soudan) et plutôt déficitaires aux extrémités (Sénégal, Ethiopie).
En 2020, la mousson a pris un tout autre visage. Du nord du Nigeria aux environs d'Agadez au Niger, des frontières du Cameroun à celle du Tchad, de vastes zones ont été inondées par la crue d'affluents du Niger et le débordement du bassin du lac Tchad. Du côté de Niamey, le niveau du fleuve Niger a atteint son plus haut niveau historique depuis 1929. Dans la région de Tombouctou, il a été enregistré plus de 300 millimètres de pluies en août et septembre, quantité supérieure de 175 mm à la moyenne annuelle de la région.
Le constat est identique plus à l'Est, dans le nord de l'Ethiopie. Le niveau du Nil a atteint un record historique de plus de cent ans.
L'excès de précipitations se reflète dans la production de biomasse (mesurée par relevés satellitaires), comme le montre la carte ci-dessous (source : Action Contre la Faim)
Cela a probablement des effets bénéfiques sur certains milieux naturels. Mais il faut souligner que, sous l'effet des modifications climatiques, la mousson se traduit depuis quelques années par des pluies plus courtes mais plus violentes.
Malheureusement, cela a des conséquences dramatiques sur les populations humaines car villes et cultures subissent submersions et destructions, sans parler des victimes directes.
Rossignol philomèle et Hypolaïs polyglotte (adultes capturés sur le site SPOL).
Three months of intense rain every year...
At the end of June, moist sea air penetrates African lands, « sucked up » by the low pressures of the southern Sahara. This humid air releases enormous quantities of rain : in 3 months, it falls 600 mm of water on Niamey, as much as in Paris in one year, and with a higher evaporation !
The phenomenon is interrupted in September.
The precipitation anomaly graph presented above illustrates the large variations in the amount of rainfall that the Sahel can experience from one monsoon to the next (source : JISAO).
The great drought of the 1970s and 1980s, which ended with the 1994 monsoon, is clear on this chart.
Since the end of the 1990s, the region has been experiencing a succession of "positive" monsoons and "negative" monsoons.
The 2012 monsoon season marked the beginning of a period of average or excess rainfall, as in 2015 and 2016.
If this improvement can benefit the flora and fauna, however, the situation of local human populations remains precarious, highly dependent on the amount of fodder available to livestock during the summer.
The period June-August 2018 saw slightly above normal amounts of precipitation throughout the Sahelian zone (+ 50 to + 150 mm of precipitation for these 3 months).
The, rainfall was abundant in the central part (Mali, Niger) and more rare in the west (Senegal) and east, signing a « positive » balance sheet, welcome after a dry season (Novembre 2017 to May 2018) remained in the norm.
In 2019, rainfall from June to August was substantially over the central Sahel (central Mali, Niger, Chad, southwestern Sudan) and rather deficient at the extremities (Senegal, Ethiopia).
In 2020, the monsoon has taken on a whole new face. From northern Nigeria to the vicinity of Agadez in Niger, from the borders of Cameroon to that of Chad, large areas were inundated by the flooding of tributaries of the Niger and the overflow of the Lake Chad basin. On the Niamey side, the level of the Niger River is at its highest historical level since 1929.
The situation is identical further east, in northern Ethiopia. The level of the Nile reached an all-time high of more than a hundred years.
The excess precipitation is reflected in the production of biomass (measured by satellite surveys), as shown in the map below. This probably has beneficial effects on certain natural environments. But it should be noted that, under the effect of climatic changes, the monsoon has resulted in shorter but more violent rains in recent years.
Unfortunately, this has dramatic consequences on human populations because cities and cultures are submerged and destroyed, not to mention direct victims.
Les zones climatiques en Afrique de l'Ouest
Déroulement de la mousson : précipitations mensuelles moyennes, en mm, selon les latitudes (graphe tiré de "Living on the edge", voir en bas de cette page).
Historique de la mousson : anomalie par rapport à la moyenne depuis 1900. La "Grande Sécheresse" (1972-1993) apparait nettement sur ce graphe (tiré de "Living on the edge", voir en bas de cette page).
Espèces hivernant au Sahel
L'impact de ces aléas a pu être mesuré à l'échelle de notre site. La fréquence de capture (nombre d'individus capturés par mètre de filet) des quatre espèces hivernant au Sahel est le reflet de son abondance, elle-même fortement dépendante de sa survie hivernale .
Les variations de cette fréquence constitue donc un indicateur que l'on peut comparer à la qualité de la mousson dans les zones sahélienne et sahélo-soudanienne.
A l'automne 2011, le Sahel a connu un déficit de précipitations (anomalie de -10 litres/m²/mois par rapport à la moyenne 1900-2011). Cette saison des pluies déficitaire a mis fin à une série de trois hivers sahéliens "cléments" (un excédent record de 16,1 litres/m²/mois avait même été enregistré durant l'hiver 2010-11).
Conséquence immédiate sur notre site d'étude, la fréquence de capture de 3 de nos indicateurs a fortement diminué au printemps 2012 :
Fauvette grisette (- 65 %)
Fauvette des jardins (- 60 %)
Rossignol philomèle (- 50 %)
Seul l'Hypolaïs a vu sa fréquence de capture augmenter (+ 11 %).
Dans un passé récent, deux autres hivers secs avaient été enregistrés en 2004-5 (-13,6) et 2007-8 (-12,9).
A noter que la présence irrégulière du Phragmite des joncs en tant que nicheur sur le site (en 2010 par exemple) est peut-être conditionnée directement par le taux de survie hivernale de l'espèce et donc aussi par les conditions d'hivernage.
Quant à la Rousserolle effarvatte, elle hiverne en majorité dans les mangroves de la zone tropicale, et non dans les zones humides du Sahel, et n'est donc pas impactée.
Passerines wintering in Sahel
Four species studied are subject to the Sahel climate fluctuations during the months wintering and migration :
Whitethroat (herbaceous savannas), Garden Warbler (savannas), Melodious Warbler (savannas), Nightingale (savannas).
The impact of these uncertainties could be measured on the scale of our site. The capture frequency of each species (numbers caught per meter net ) is a reflection of its abundance, itself heavily dependent on its winter survival.
Variations of this frequency is therefore an indicator that can be compared to changes in rainfall in the Sahelian and Sudano-Sahelian zones.
In autumn 2011, the Sahel was a rainfall deficit (anomaly of -10 liters / m² / month compared to the average 1900-2011).
This deficit rainy season ended a run of three mild sahelian winters (a record surplus of 16.1 liters / m² / month was even recorded in the winter of 2010-11) . Immediate consequence on our study site, capturing frequency of 3 of our indicators fell sharply in spring 2012 : Whitethroat ( - 65%), Garden Warbler ( - 60%), Nightingale ( - 50%).
Only Melodious Warbler saw his capture frequency increase (+ 11%).
In the recent past, two dry winters were recorded in 2004-5 ( -13.6 ) and 2007-8 ( -12.9 ) .
Note that the irregular presence of Sedge Warbler as nesting on the site (in 2010 for example) may be conditioned by the winter survival of the species and thus also by the wintering conditions.
As for the Reed Warbler, it does not overwinter in wetlands Sahel but mostly in the mangroves of the tropical zone and is therefore not affected..
Pour en savoir plus sur l'hivernage des oiseaux au Sahel, lire l'excellent :
Living on the edge - Bird migration - European migratory birds - Wetlands and birds in a changing Sahel
Auteurs : Leo Zwarts, Rob Bijlsma, Jan van der Kamp, Eddy Wymenga (2009)
Publié aussi en français (2015)
Référencement bibliographique :
FREDERIC L. (2020), "Etude d'une population d'oiseaux par le baguage. Avifaune des bords de Loire près d'Orléans" : www.lioric.com. Tous droits réservés.